Escalade et granite au Mont Blanc : explications et invitation…
L’escalade en grande voie à Chamonix, et plus largement dans le massif du Mont Blanc, a une saveur si particulière à mes yeux qu’elle mérite bien cet article. Si vous connaissez déjà, passez votre chemin, vous n’apprendrez rien ici. Si, au contraire, vous êtes curieux(se) de franchir le pas -et pourquoi pas avec un Guide de haute Montagne– alors cet article peut vous être utile.
Mont Blanc côté Suisse, en redescendant du Clocher du Portalet
Le massif du Mont Blanc, une destination d’escalade?
Assurément, oui, oui et re-oui! Le massif du Mont Blanc est à mes yeux une des plus belles destinations au Monde pour grimper en grande voie. Rien que ça. Pourquoi?
- le massif du Mont Blanc est proche de chez nous. A la différence d’autres lieux mythiques de la grimpe en grande voie comme les Dolomites (1 journée de voiture) ou le Yosemite (2 jours de voyage) le massif du Mont Blanc se rejoint facilement, et peut donc s’envisager sur un gros week-end, ou plus si affinités.
- le massif du Mont Blanc est accessible. Ce point rejoint le précédent, à savoir que l’on peut être « rapidement » aux pieds des voies, avec ici ou là quelques installations mécaniques pour vous y aider (téléphérique, train à crémaillère…). Il existe bien entendu des endroits tout aussi déments pour grimper, voire plus, mais où l’approche est un peu moins « simple » pour grimper (exemple : Patagonie, Sierra Nevada…)
- le rocher y est de bonne, voire d’exceptionnelle qualité, et c’est peut être avant tout ce que recherche le grimpeur. Et qui plus est, ceci se vérifie quel que soit le niveau de la voie grimpée : le granite, par sa structure et par son altitude, est dans l’ensemble toujours pur. Comprenez par là que même dans des voies « faciles » (attention au mot « facile » en granite!) la qualité du rocher sera au rdv, sans que celui-ci soit comblé de mousse, arbustes et autre végétation comme c’est parfois le cas en calcaire dans les voies de niveau facile.
- il existe des voies pour tout le monde, pour tout niveau, et dans une telle quantité qu’une vie pourrait y être consacrée. Et le style d’escalade est « classique » pour un grimpeur français moyen, ce qui n’est pas forcément le cas au Yosemite par exemple où, très vite, on se retrouve à faire de l’artif tellement la grimpe y est spécifique, déroutante, voire difficile! Bien sur, tout dépend du niveau de chacun, mais considérant le niveau moyen des grimpeurs, le Mont Blanc se prête plus au « clean climbing » que son grand frère Californien…
Escalade, granite, Mont Blanc, par quoi commencer?
Avant de partir grimper, il va sans doute falloir commencer par … faire chauffer la CB et vous équiper en matériel! Et oui : désolé mais le ticket d’entrée en €€€ est souvent conséquent. Si vous grimpez déjà en grandes voies, fort heureusement vous ne partez pas de zéro. Mais il va falloir investir « un minimum » sous peine de vous faire peur, voire pire. En effet, une des spécificités de l’escalade en granite dans le Mont Blanc est que l’équipement y est « traditionnel », à savoir : protections sur coinceurs dés que l’assurage naturel est possible, pitons/goujons/broches lorsque la pose de coinceurs n’est pas possible. Et pour ça, il faut des coinceurs, CQFD. Oui mais lesquels?
- un jeu de coinceurs classiques type « stoppers »; qui ont l’immense avantage de ne pas être trop chers et de rendre d’incomparables services dans bon nombre de situations. Si les fissures sont à bord strictement parallèles, ce n’est pas l’idéal. Par contre dés que ce n’est plus le cas, ils constituent des armes très redoutables dés lors qu’ils sont bien posés. Ne pas oublier de vous doter d’un crochet décoinceur pour les retirer.
Photo Black Diamond
- un jeu de coinceurs à cames, et c’est là que l’addition va commencer à être salée car ces (très) beaux engins coûtent un certain prix. Mais il faut en passer par là, pas le choix! Pour démarrer, un jeu de Camalots C4 entre le #0.3 et le #3, en doublant les #0.5, #0.75, #1 et #2 constitue une bonne base qui vous permettra de partir dans pas mal de voies. Et s’il vous reste quelques euros, essayez de compléter par de plus petites tailles de coinceurs à cames (exemple : les « C3 » de Black Diamond, Metolius).
Photo Black Diamond
L’objectif est donc de couvrir une « plage d’ouverture » assez vaste entre tous vos coinceurs, du tout petit au tout gros, sachant qu’au delà du C4#3 on est déjà dans de la fissure très large. A noter qu’à tire personnel, j’ai toujours privilégié les Camalots de Black Diamond : fiabilité, légèreté, ergonomie… ils sont parfaits pour grimper dans le Mont Blanc. J’ai également quelques autres marques qui pendent à mon baudrier, comme Metolius (malheureusement peu distribués en France). Mais avec les Camalots, vous ne pouvez pas vous tromper, c’est une valeur sûre. Pour les coinceurs type « stoppers », il existe de nombreux autres très bon fabricants. Alors effectivement, tout ça coute un bras lorsque l’on commence. Vous ne serez peut être pas obligé de tout acheter en une fois, si vous avez la chance de partir grimper avec quelqu’un qui lui aussi possède déjà quelques coinceurs ou alors si vous partez grimper avec un Guide qui apportera tout le matériel nécessaire. Un Guide de Haute Montagne pour l’escalade en granite dans le Mont Blanc sert aussi à ça. Cette formule peut vous permettre une approche progressive, pour vous rendre compte par vous même du matériel dans lequel il vous faudra investir.
Pour le reste, matériel classique d’escalade, sans oublier les sangles/cordelettes/dégaines à rallonge bien utiles pour des itinéraires qui louvoient plus souvent qu’ils ne montent tout droit.
Granite fauve, ciel bleu, dièdre en rocher parfait : les ingrédients d’une belle escalade dans le massif du Mont Blanc (contreforts de l’Aiguille Sans Nom)
Escalade en granite dans le Mont Blanc : où grimper?
Le massif est grand, granitique sur tous ses flancs, donc le choix est vaste, avec des typologies de voies/accès/difficultés fort différentes. Ci-dessous une tentative de classification des différents lieux de grimpe répartis dans le massif.
Coté français en périphérie du massif le principal secteur est directement au-dessus de Chamonix, dans les Aiguilles de Chamonix. Facilement accessible (1er tronçon de l’aiguille du midi puis marche à pieds), il propose des itinéraires de tous genres dont une bonne partie peuvent être grimpés « à la journée » en prenant la première benne du matin, et éventuellement en ratant la dernière benne du soir. De plus, à la faveur du retrait glaciaire, de nombreuses voies peuvent être approchées sans matériel spécifique autre qu’une bonne paire de chaussures d’approche. C’est assez confortable pour qui n’a pas trop de temps et ne souhaite pas se confronter au terrain glaciaire des approches d’altitude. La contre-partie de cette « simplicité logistique » est que les voies classiques sont souvent grimpées, donc vous n’y serez certainement pas seuls. Mais peut être que, pour commencer, ça vous rassurera.
Pilier Rouge de Blaitière à l’ouverture (et au nettoyage!) de Tsarmania II avec Michel Piola. Un long voyage vers le haut!
Toujours côté français, mais « au coeur du massif » on trouvera principalement les secteurs suivants :
- Aiguilles de Chamonix, côté « Envers ». Sans doute le plus gros de tous les secteurs, à la concentration d’itinéraires « modernes » à nulle autre pareille. Par contre ces voies se méritent : l’approche (et donc le retour) sont longs, voire longuets, au départ de la gare d’arrivée du train du Montenvers. De là, 3 bonnes heures de marche que le retrait de la mer de glace n’améliorent pas, pour un séjour dans le joli refuge de l’Envers des Aiguilles. Les voies sont « derrière » le refuge, avec des approches sur terrain glaciaire potentiellement mouvementées (voire impossibles) à mesure que l’été avance. Un des avantages pour privilégier ce secteur, outre sa beauté, est que la majorité des voies n’y sont pas très raides, beaucoup sur les pieds, et m’apparaissent globalement moins exigeantes que ce que l’on trouvera dans certains autres secteurs. Du fait de la longueur de l’approche, il faudrait idéalement y aller pour 3 jours, afin d’avoir la journée du milieu sans contrainte horaire autre que celle de rentrer dormir au refuge, afin de s’essayer sur une des loooooongues voies que propose le coin. Vous y ferez alors des voies mythiques et de toutes beauté sans pour autant avoir besoin d’être un champion du monde de grimpe. Par exemple, la voie « Subtilités dulfériennes » propose une incroyable escalade de 500m dans des dièdres en…5+/6a. Qu’on se le dise!
Pureté des lignes et rocher parfait dans « Oublies ta vie », Envers des Aiguilles
- Bassin d’Argentière, au dessus du refuge éponyme. Ici, le maître mot pourrait être « grimpe au soleil » tant le vaste versant sud qui domine le refuge chauffe vite et bien dés les premiers rayons du soleil. Là encore, approche semi mécanisée (Télécabine des Grands Montet) et marche glaciaire permettent de rejoindre le Refuge d’Argentiere, qui servira de camp de base aussi longtemps que vos pieds et bras pourront grimper. Refuge accueillant, gardiens au top, grimpe en t-shirt et rocher ocre : des ingrédients pour un super séjour! A noter là-encore des voies de tous niveaux, avec un certain renouveau dû à l’ami Eric Moro qui a installé son perfo à quelques reprises par là-haut ces derniers été. En marchant un peu à l’amont du refuge, on trouvera les incroyables fissures de « Versant satanique », et des pépites comme « Le pirate », une des plus belles voies du massif à mon goût. Plus loin encore, la face sud de la Pointe des Améthystes, bien qu’un peu délaissée, propose également de sacrées envolées. A l’aval, on trouvera aussi des secteurs de voies plus difficiles, plus raides, notamment autour du secteur de la Vierge en allant vers l’Aiguille d’Argentiere.
Bassin d’Argentiere, cannelures de rêve et grande journée dans « Le Pirate ».
- Secteur Flammes de Pierre / Charpoua / Couvercle. Un très beau secteur dans les contreforts des Drus et du chaînon des ecclésiastiques. L’accès se fait depuis le train du Montenvers, mer de glace puis une longue série d’échelles qui permettent de bifurquer au choix vers l’incroyable refuge de la Charpoua ou celui du Couvercle. Pour le secteur Flammes de Pierre / Charpoua et à quelques exceptions prêt, les voies sont globalement difficiles du fait de la raideur du rocher, bien plus vertical que dans les Aiguilles de Chamonix (à l’exemple des Flammes de Pierre : massage de bras garantis!). Il y a donc ici bien moins de grimpeurs qu’en face dans les Aiguilles ou qu’à Argentière, le ticket d’entrée étant plus costaud. Pourtant, quelques voies mythiques s’y trouvent cachées : La voie du Druide, Sale Athée, Miss tique… Quelles envolées! Et puis passer une ou deux nuits au refuge de la Charpoua est magique en soi : a peu de choses près, Walter Bonatti a dû boire sa soupe sur le même banc à la veille de son grand voyage aux Drus…On pourrait ajouter à ces lieux les voies d’escalade derrière le refuge de Leschaux, mais je dois avouer que je n’y ai jamais verrouillé un doigt : le granite « noir » ne m’a jusqu’ici pas attiré. Quitte à aller à Leschaux, j’ai préféré grimper la majestueuse « Anouk ».
Contreforts des Drus, dans « Michelle Angello » : une voie délaissée et pourtant majeure.
Côté italien, on trouvera principalement deux secteurs : autour du refuge Monzino pour des voies classiques sous l’imposante face sud du Mont Blanc, mais aussi dans le val ferret italien autour du refuge Dalmazzi. J’avoue ne pas y être beaucoup allé, mais pourtant le secteur Dalmazzi présente à mon avis un intérêt : celui de découvrir la grimpe en granite (si spécifique!) dans des voies équipées ou quasi toutes équipées. Ca peut permettre de faire de belles et longues voies en granite pour apprivoiser ce rocher, sans pour autant devoir être un habitué de la pose de coinceurs. Les voies y sont bien plus équipées que pour les secteurs précédents.
Côté Suisse enfin, on trouvera le secteur Orny / Aiguilles Dorées. De belles voies faciles au dessus de la Cabane d’Orny ou de grands voyages nettement plus difficiles aux Dorées, les Suisses savent nous accueillir! Suffisamment éloigné pour ne pas traîner beaucoup de grimpeurs, avec qui plus est une cabane non gardée imposant des sacs a dos lourds, le secteur des Dorées face sud recèle certaines des plus belles voies du massif à mon sens, à l’image de ce que l’on trouve à l’aiguille de la varappe ou au Capucin des Dorées (un nom qui devrait vous rappeler un sommet mythique pour la grimpe). Et puis l’inoxydable Michel Piola est encore très actif par là haut, et nous propose encore et toujours de nouvelles pépites à grimper auxquelles j’ai eu l’honneur de contribuer. Pas si loin que ça, l’imposant Clocher du Portalet permet aussi d’incroyables envolées, souvent raides.
Fissure large en haut du Capucin des Dorées : « le sud, le soleil, les palmiers, la plage », une des plus belles voies du Mont Blanc?
Enfin, il existe toutes les voies que je qualifierais de « voies d’altitude », au coeur du massif aussi bien coté italien que français : Combe Maudite, Grand Capucin et satellites, Tacul, Aiguille du midi, Envers du Mont Blanc, Petites Jorasses, Tour des Jorasses… Parfois d’approche simple et rapide (face sud de l’Aiguille du Midi , Pointe Lachenal), parfois d’approche on ne peut plus alpine comme les voies de l’Envers du Mont Blanc (on est là d’avantage dans un combi alpi/grimpe que dans la grimpe pure) ces voies sont encore très nombreuses et de toute beauté pour un grand nombre d’entre elles, mais elles s’adressent à des grimpeurs déjà habitués à l’escalade en granite. Le facteur « altitude » vient ici en effet ajouter de la difficulté à l’escalade pure, sans même parler des problématiques d’accès/franchissement de rimaye/itinéraires qui confèrent à ces voies un caractère globalement très « alpin ».
Grand Capucin, les longueurs magistrales du début de « l’Elixir d’Astaroth »
Escalade en granite dans le Mont Blanc : quel(s) topo(s)?
La question mérite d’être posée pour deux raisons :
- d’une part car, en voies TA/trad , la qualité du topo est essentielle, sous peine de vous retrouver scotché en haut d’une fissure bouchée, des dalles lisses et improtégeables à droite, à gauche, au-dessus, en mode « terreur-par-où-je-vais-tiens-moi-bien-sec« . Ce jour là, en lorgnant là-bas à droite la « vraie » fissure que vous auriez dû suivre, vous vous direz que vous auriez mieux fait d’acheter un vrai topo plutôt que d’économiser 30€ et de partir avec un « descriptif gratuit » écrit au petit bonheur la chance.
- d’autre part et surtout car l’équipement de voies d’escalade n’est jamais gratuit et que, dans certains cas, le fait d’acheter un topo permet à l’ouvreur de financer tous les jolis petits points en inox qu’il a placé/placera ici et là dans la montagne, et que vous serez bien content(e) de clipper un jour ou l’autre après avoir posé quelques protections aléatoires dans ce passage que, depuis le bas, vous pensiez « passer crème ».
En matière de voies ouvertes, et donc de topos associés, la référence absolue et incontestable dans le massif du Mont Blanc est Michel Piola. Grand grimpeur, grand alpiniste, grand ouvreur, il nous offre ses créations en tout genre dans le massif du Mont Blanc (et partout ailleurs devrais-je dire) avec un véritable « Label Piola » à la clef. Ce label est globalement synonyme de belle voie, et d’équipement pas loin d’être irréprochable. Et comme Michel Piola édite ses topos, il me semble normal et logique de rendre à César ce qui lui appartient : achetez ses topos, et l’argent sera directement réinvesti dans de belles broches inox auxquelles vous serez heureux de faire confiance pour tirer vos rappels après une longue journée. Et c’est sans parler de ses heures, ses jours, ses semaines passées « là haut » à équiper, nettoyer, et encore nettoyer. J’ai appris avec lui que si c’est voies sont belles, c’est parce qu’il y passe du temps.
4 générations de « topo Piola », et toujours la même exigence de qualité
A l’ouverture de « La croisière s’amuse » aux Aiguilles Dorées avec Maître Piola, 16 longueurs de rocher fauve… et un topo tout nouveau qui vous attend.
Il existe bien entendu d’autres topos. Je ne parle pas ici des topos « gratuits » type C2C, mais de topos papiers. Les seuls qui a mon avis vaillent qu’on s’y intéresse (pour la grimpe!) sont les topos » Mont Blanc Granite », tome 1 et 2, de JME Editions. Si ces topos ne sont pas parfaits, je leur trouve le mérite de remettre au gout du jour certaines voies anciennes un peu tombées dans l’oubli pour lesquelles la documentation commençait à se faire rare. Par contre pour les voies récentes ou récemment rééquipées, continuez de prendre les infos à la source, à savoir dans les publications de Michel Piola : ça vous évitera par exemple d’attaquer le dièdre en 7a de L4 de « Une saison en enfer » (Vierge d’Argentière) en pensant que c’est tout spité, alors que le rééquipement de 2014 laisse la part belle aux géniaux C3 Camalots (qui n’existaient pas encore à l’ouverture). Qu’on se le dise!
Eté 2014, rééquipement avec Michel Piola de « Une saison en enfer » à la Vierge d’Argentière. L’équipement d’origine est substantiellement modifié, rendant inexact dés sa sortie le topo de JME Éditions…
En synthèse, considérez les topos de Michel Piola comme LA référence, et documentez-vous ailleurs pour compléter les secteurs / voies où les topos de M. Piola font l’impasse. Mais il en existe peu ;o)
Escalade en granite au Mont Blanc : les conseils du Guide
Voici quelques conseils que je me permets de suggérer ici, propres aux voies granite du massif du Mont Blanc, basés sur les quelques kilomètres de voies que j’ai avalés dans le massif ces dernières années.
- grimpez humblement : si vous n’êtes pas un aficionado du granite, allez-y doucement et progressivement. La grimpe en granite est très spécifique, bien différente du calcaire, et quand en plus vous devez vous préoccuper de chercher l’itinéraire ET de poser vos protections, ça fait 3 points à « gérer » pour le leader. Si le granite c’est comme le vélo, ça ne s’oublie pas, l’expérience me montre que le « retour » au granite après une période d’abstinence est toujours un peu déconcertant, plus que pour le vélo. Notamment car le granite propose cette alternance de sections « physiques » (écailles, fissures) et de sections ultra techniques en dalle, lorsque les écailles se terminent. Le terme « gratton » reprend alors tout son sens, et le maître mot est la pose de pieds. Considérez que toute dalle à partir de 6a+/6b sera « déconcertante » si vous n’êtes pas habitué(e) au granite. De plus, avec la structure du granite d’altitude, pas besoin d’être dans du 7b+ pour faire de la belle grimpe loin des touffes d’herbes et autres ronces…
Une grimpe envoutante dans cette longueur de « Smile » à Tré-la-porte : pourtant, 6a seulement. Le granite d’altitude, c’est toujours beau!
- « gérez » votre matériel, coinceurs notamment, en essayant d’anticiper les tailles dont vous aurez besoins dans les passages clefs que vous apercevez. Une bonne gestion passe aussi par du matériel « rangé » sur le baudrier, par tailles du plus petit au plus grand ou l’inverse. Histoire que quand vous cherchez un « gros », votre main sache à peu près où il se trouve sur votre baudrier. A ce titre, j’avoue que les petits mousquetons BD (Miniwire Rackpack) assortis à la couleur des coinceurs auxquels ils sont destinés sont un sacré plus : un #3 rouge s’attrape bien plus rapidement si le mousqueton qui le porte est … rouge lui aussi. Tout bête mais tellement pratique, lorsque les porte-matériel du baudrier sont chargés à bloc de quincaillerie en tout genre… Gérez aussi votre corde : on est ici en montagne et non pas dans les fissures rectilignes d’Indian Creek, et la corde a double / corde de rappel est encore à mon avis ce qui se fait de mieux pour gérer le tirage sur de grandes longueurs où il faut « louvoyer » d’un côté et de l’autre.
Corde à double, anticipation, gestion du tirage… Pointe des Améthystes, face sud.
- considérez le retrait glaciaire comme une vraie problématique : à la fois pour les approches (quand les glaciers d’antant se transforment en de putrides moraines de blocs instables, la gravité peut faire de dégâts) mais aussi et surtout pour les départs de voie. En effet, entre le niveau des glaciers lors de l’ouverture de la voie (années 80-90 pour beaucoup) et aujourd’hui, et bien il s’en est passé des choses! Ainsi, dans le cas où la voie n’aurait pas été rééquipée, le « 1er point » ou la « 1ere fissure accessible » sont parfois désormais perchés à 20 mètres au dessus de votre tête avec, entre vous et lui, de la dalle lisse, lisse et ultra lisse où même un lézard des années 80 se mettrait terreur. Dans d’autres cas, le glacier a certes un peu baissé mais parallèlement se « décolle » de la base des rochers au fur et à mesure que l’été/chaleur/sécheresse avance : ainsi, entre la bande de neige ou vous pensiez vous équiper et le rocher, un trou de 2 mètres de large et plongeant dans de noires abîmes sans fond vous obligera à tenter un grand saut hasardeux … ou à faire demi-tour, bredouille mais vivant. C’est particulièrement le cas dans le secteur de l’Envers des Aiguilles, ou certains départs de voies deviennent impraticables avec l’avancée de l’été.
Départ de voie en face sud des Petites Jorasses à la fin mai : déjà un beau trou mais un pont de neige encore bien présent. Qu’en resterait-il fin Aout?
- Entrainez-vous à la pose de coinceurs avant d’être dans le dur ou perdu dans la montagne. Pour celà, il existe des endroits très accessibles, tout en offrant un granite comparable à celui que vous trouverez dans le massif du Mont Blanc. Je propose par exemple un séjour découverte dans le Val d’Orco (Italie) qui remplit pleinement cet objectif de découverte/préparation. Ca peut constituer une bonne option.
Escalade en granite dans le Mont Blanc : avec un Guide de Haute Montagne?
Si c’est avec moi (ou avec Michel Piola), oui ;o)
Plus sérieusement, bien entendu il n’y a rien d’obligatoire. Tout dépend de ce que vous cherchez, de votre niveau, de votre temps… J’ai longtemps grimpé dans le massif du Mont Blanc sans Guide… Mais sachez que c’est aussi une option, et que certains Guides (dont moi) passeraient volontiers leur été à emmener des clients grimper ces belles lignes du Mont Blanc. A la journée ou à la semaine, les possibilités de voies et de séjour sont immenses, pour de la magnifique grimpe qui ne pourra pas vous laisser indifférent(e). Et vous savez quoi? S’il fait mauvais dans le Mont Blanc, on ira dans le Verdon :o))))