Aout 2020, mois coché dans l’Agenda depuis belle lurette : stage final du cursus de Guide, rien de moins. En apothéose, une semaine de découverte dans les Dolomites de Brenta pour y gouter ses mythiques escalades.
Au-delà de l’enjeu de ce séjour, il y eut avant tout une magnifique découverte pour moi : celle d’un massif convoité depuis longtemps mais jamais visité, la faute au temps qui passe trop vite et aux priorités qui relèguent parfois les perles au simple rang du quelconque. Mais peut être que finalement l’attente valait le coup, la rencontre n’en fut que plus belle.
Une belle équipe motivée (Maud, Rémi, Raph, Mickael, Cyrille), deux coaches admirables (Pierre, Philippe) et les Dolomites de Brenta dans le viseur pour y gravir de belles classiques en « terrain d’aventure » (mot chargé de sens dans les Dolos!). Nous grimpons dans deux belles voies : « Vienna » à la Cima d’Ambiez (350m. TD) puis la « Voie des Guides » au Crozzon di Brenta (800m. TD) . Dans les deux cas la surprise est aussi bonne que totale : moi qui m’imaginais que grimper dans les Dolomites revenait à choisir entre mauvais ou très mauvais rocher (bon j’exagère un peu) je me suis bien fait corriger. Dans les 2 voies, du rocher très bon à excellentissime, avec souvent un cocktail explosif alliant le meilleur des Cerces, des Aravis, du Verdon et de Céuse… Bref, on est loin du rocher pourri des voies TA de Chartreuse ou du Vercors et c’est tant mieux :o)
Après une approche mythique en Defender façon piste du Zanskar, montée tranquille dans le vallon d’Ambiez en direction du refuge Agostini. La Cima d’Ambiez est au fond dans les nuages.
Le lendemain nous partons dans la voie Vienna : une magnifique escalade dans un rocher fantastique, avec peu d’équipement en place mais qui se protège très bien. Un jeu de Camalots, quelques coinceurs, du kevlar pour les lunules et ça suffit. Cette voie grimpe sans jamais être difficile, avec un peu de « sens de l’itinéraire » requis dans les raides longueurs du bas. Mais quel rocher! Quelle classe!
Après une redescente par la voie normale, nous filons au refuge Pedrotti en passant par la Via Ferrata Brentari, ce qui permet de découvrir la qualité de l’équipement des Via dans les Dolomites (pour mémoire, les Via Ferrata sont nées dans les Dolos) : proprement incroyable par rapport à ce que j’ai pu voir en France. Ici, on est chez les pros, pas de doute.
C’est aussi l’occasion de déambuler dans ce désert minéral.
Après une nouvelle bonne soirée au refuge Pedrotti, nous partons pour un long morceau de grimpe, la Voie des Guides au Crozzon du Brenta. Une grande classique des Dolomites de Brenta. On entre là (pour moi) dans ce qui fait la réputation des Dolos : de longs itinéraires (800m. ici) avec pas ou peu d’équipement en place. La beauté de la voie n’a d’égale que ma frustration d’avoir laissé l’appareil photo dans mon dos (on était pas en mode « contemplation »…) . Mais heureusement les copains n’ont pas oublié, eux, qu’on peut aussi shooter au smartphone (cf. plus bas).
La Voie des Guides est une magnifique classique, forcément osée quand on pense au matériel utilisé dans les années 1930 lors de l’ouverture. Ça déroule tout le long, dans du 5+ max et quasiment toujours sur du bon rocher. Un poil de sens de l’itinéraire est quand même requis, même si dans ce type de voie c’est toujours un peu la même chose : viser au plus simple en se mettant dans la peau des ouvreurs (corde en chanvre autour de la taille, coins de bois, chaussures à clous…). J’ai adoré cette voie. Prévoir un jeu de coinceurs, la majorité des longueurs se fait bien en baskets.
Le matin pendant l’approche, je trouvais que ces vallées avaient un petit air de Jordanie / Wadi Rum (de grandes faces raides, partout…). La descente depuis le sommet du Crozzon di Brenta n’a fait que confirmer cette impression : un itinéraire digne des plus belles voies bédouines du Rum, mêlant descentes improbables, traversées gazeuses, remontées subtiles… Et on se dit que dans le mauvais temps, le petit bivouac posé au sommet prend toute sa justification et a dû éviter bien des galères. Encore une fois, chapeau aux anciens d’avoir déniché ces parcours. Un croquis de descente ici qui pourra vous être utile ;o)
(deux aperçus ci-dessus / ci-dessous de la voie de « descente » :o)))
En synthèse, et avant les photos des copains (merci Pierre, Philippe, Maud) un grand « Vivat! » aux Dolos, aux italiens, aux grimpeurs d’hier et d’aujourd’hui . Vivat! car votre massif est magnifique et vous l’entretenez bien. Vivat! pour vos refuges posés partout dans le massif, toujours accueillants, généreux (Ah la Grappa Mugo de Pedrotti…). Vivat! pour votre culture si montagnarde, qui vous fait préserver le caractère unique de vos voies à la montée, tout en sécurisant les descentes là où il le faut sur de beaux relais chainés et broches en inox. Vivat! pour la qualité de l’équipement de vos via Ferrata et chemins de randonnée, qui font que ce massif et ses acteurs (refuges, Guides, etc.) semblent vivre pleinement de la saison touristique, le tout dans une ambiance détendue et conviviale. Je connais un paquet « d’acteurs » de nos Alpes qui feraient bien de partir en stage dans les Dolos… Vivat! enfin pour la qualité de vos topos, qui en plus d’être fiables donnent tout simplement envie de revenir éplucher une à une les merveilles qui y sont présentées. Nous avons pour notre part surtout utilisé ce topo-ci.
Voilà, j’ai adoré, en conscience que les Dolomites de Brenta ne sont qu’une partie infime d’un plus vaste ensemble où 10 vies ne suffiraient pas pour tout grimper. Et ça conclue en beauté un « Final été » du cursus de Guide qui, si le Covid n’était pas passé par là, aurait marqué la fin de ma formation et l’aboutissement d’une histoire quelque peu « osée » engagée en 2016… On en reparlera ici en Janvier 2021 :o)
Quelques photos complémentaires des mes compagnons de cordée. Merci à vous
Cest magnifique Yann. Comme d’hab japprecie le recit, les photos..bravo a l’équipe et merci de nous emmener quelques temps dans le rêve.